Babillard

Gestion des eaux pluviales et génie végétal : La contribution d’une ou d’un ingénieur est-elle toujours requise?

L’augmentation des précipitations annuelles a déjà des effets tangibles sur l’environnement, les communautés et l’économie. La Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, mise à jour en 2021, oblige les municipalités à inclure des mesures pour limiter les impacts du ruissellement des eaux pluviales. Les municipalités incluent donc de plus en plus de mesures pour limiter ces impacts et exigent, notamment, que les demandeurs de permis fournissent un plan de gestion des eaux pluviales (PGEP). Qui peut préparer ce document?

Élaboration d’un plan de gestion durable des eaux pluviales

Un plan de gestion durable des eaux pluviales est constitué d’un ensemble de mesures et de stratégies visant à réduire le ruissellement, à limiter la charge polluante des eaux et à augmenter leur infiltration dans le sol.  

Dans les projets de développement ou de requalification de sites, l’élaboration d’un PGEP peut se faire à différentes échelles (quartier, lot, terrain, etc.). Le plan repose sur plusieurs étapes clés : réaliser un inventaire du site, examiner la réglementation en vigueur en urbanisme et en environnement, identifier les leviers d’intervention adaptés et concevoir les infrastructures appropriées. Quel est le rôle de l’ingénieur·e dans cette démarche ?

L’ingénieur·e au sein d’une équipe multidisciplinaire

Bien que le domaine de la gestion des eaux pluviales soit en général associé à l’ingénierie, les guides de pratique (voir la section Références) mentionnent tous qu’en matière de gestion durable des eaux pluviales, il est avantageux, voire nécessaire, de recourir à l’expertise de plusieurs professionnels, afin de maximiser l’efficacité et le succès des initiatives en cette matière. 

En vertu de la Loi sur les ingénieurs, la préparation d’un plan de gestion des eaux pluviales exige la contribution des ingénieures et des ingénieurs pour, notamment, réaliser les études hydrauliques et hydrologiques, effectuer des analyses de risques, concevoir ou modifier les infrastructures (conduites, bassins, etc.), préparer les plans et les devis requis pour les travaux et s’assurer que les normes de conception sont bien respectées. 

La contribution des architectes paysagistes est également importante pour les questions concernant les infrastructures vertes, leur intégration harmonieuse à la trame urbaine, la sélection des végétaux ainsi que la mise en place des conditions favorisant leur développement. Ils seront également responsables de préparer les plans et devis relatifs à ces travaux.

Finalement, les compétences des urbanistes en aménagement et utilisation du territoire ainsi qu’en matière de réglementation seront également nécessaires. En effet, la gestion durable des eaux pluviales doit être appuyée par des outils de planification et de réglementation qui s’intègrent avec les différents objectifs des municipalités (optimisation de l’occupation du territoire, mobilité, diminution des îlots de chaleur par la déminéralisation, etc.).

Signatures

Les plans de gestion des eaux pluviales doivent être signés par un·e ingénieur·e et un·e architecte paysagiste. D’autres signatures peuvent s’ajouter, selon les circonstances et les projets, comme celle de l’urbaniste, notamment si le PGEP s’inscrit dans un plan plus large d’aménagement du territoire.

Facteurs de succès

Plusieurs facteurs contribuent au succès des projets en matière de gestion des eaux pluviales. L’initiation de la réflexion en amont des projets de développement et de requalification du territoire est cruciale. Par exemple, le fait de minimiser les surfaces imperméables ou d’assurer la préservation des zones végétalisées dans les projets de développement aura un impact majeur sur la suite du projet.

La participation active des citoyens aux projets est également un facteur de succès important, car elle permet de mieux répondre aux besoins locaux et de renforcer l’acceptabilité et l’appropriation des solutions proposées. Certains projets majeurs ont en effet proposé des séances d’informations et même des ateliers de cocréation impliquant les résidents des quartiers touchés, dans le but d’augmenter l’acceptabilité sociale.

Finalement, penser à l’entretien des ouvrages de gestion des eaux pluviales, en prenant notamment en considération les conditions hivernales, est également essentiel. 

Génie végétal

Les projets de gestion des eaux pluviales utilisent souvent des techniques de génie végétal. L’OIQ a publié une chronique qui traite spécifiquement de ce domaine du génie. Si ce sujet vous intéresse, nous vous invitons à consulter la chronique sur le site de l’OIQ en cliquant sur ce lien : https://www.oiq.qc.ca/publication/genie-vegetal-comment-sapplique-la-loi-sur-les-ingenieurs-dans-ce-domaine/

Conclusion

L’augmentation de la fréquence et de l’intensité des pluies nécessite l’implantation de plans d’actions concertés. Les lois et règlements exigent de plus en plus l’intégration des principes de gestion durable des eaux pluviales dans les projets de développement ou de requalification de sites. Ces principes font certes appel aux compétences exclusives aux ingénieur·e·s dans le domaine des infrastructures urbaines, mais exigent la collaboration entre les professionnel·le·s, les responsables municipaux et les citoyen·ne·s.

Références

Plusieurs guides existent regroupant des recommandations, des bonnes pratiques et des guides de conception. Nous en citons trois ici :

CERIU : Guide d’intégration de la gestion des eaux pluviales dans l’aménagement d’un site dans une approche urbanistique – 2e édition : https://ceriu.qc.ca/bibliotheque/guide-integration-gestion-eaux-pluviales-amenagement-site-approche-urbanistique-2e

MELCCFP : Guide de gestion des débordements et des dérivations d’eaux usées, tome III, chapitre 19 : https://www.environnement.gouv.qc.ca/eau/eaux-usees/ouvrages-municipaux/debordements/guide/guide-gestion-debordements-tome3.pdf

Site du MELCCFP : Guides et documents de référence d’aide à la conception

Article écrit par : Mme Marie-Julie Gravel, ing. et Me Patrick Marcoux, de l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ)